Quinzième réunion sur la définition des paramètres de l'enquête : 9 et 10 février 2016, Saskatoon (Saskatchewan)
Dans le cadre de l'enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, le gouvernement du Canada a tenu sa quinzième rencontre de mobilisation à Saskatoon, en Saskatchewan, le mardi 9 février et le mercredi 10 février 2016. Des survivantes, des familles et des proches des victimes ont participé à cette rencontre préalable à l'enquête. Leur expérience, leurs opinions et leurs contributions serviront à définir les paramètres de l'enquête.
Vous trouverez ci-dessous un résumé de la rencontre. Ce résumé ne consiste pas en un compte rendu complet des discussions. Il met plutôt en relief les principaux thèmes qui sont ressortis de cette rencontre de mobilisation. Vous pouvez également consulter le guide de discussion.
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Aperçu
La séance de mobilisation s'est déroulée sur deux jours. La première journée consistait en une journée de préparation et a été consacrée à une séance d'orientation et à un cercle de partage où les survivantes, les familles et les proches des victimes pouvaient échanger leurs récits personnels liés à la violence à l'endroit des femmes et des filles autochtones.
La deuxième journée a été consacrée à la façon dont l'enquête devrait être définie. La séance s'est ouverte sur les paroles empreintes de sagesse de certains aînés et a été suivie d'une chanson traditionnelle en l'honneur des femmes. Les ministres ont ensuite prononcé des remarques d'allocution. Une chaise vide a été placée dans la salle afin de porter hommage aux femmes et aux filles disparues et assassinées. Des prières ont aussi été adressées aux personnes les plus touchées par ces tragédies.
La ministre de la Justice et procureure générale du Canada ainsi que la ministre des Affaires autochtones et du Nord ont écouté les participants parler des effets de cette violence sur les survivantes, les familles des victimes et leurs collectivités.
Les personnes qui assistaient à la rencontre de Saskatoon ont fait part de leur désir de voir les victimes directes de la violence jouer un rôle prépondérant dans l'enquête nationale et ont demandé qu'on tienne compte de leurs besoins tout au long du processus.
Les participants
Des survivantes, des membres des familles et des proches des femmes et des filles autochtones assassinées et disparues ont assisté à la rencontre préalable à l'enquête. Des représentants d'organisations de femmes et d'autres personnes qui apportent leur soutien y ont également assisté. Soulignons également la présence de :
- l'honorable Carolyn Bennett, ministre des Affaires autochtones et du Nord;
- l'honorable Jody Wilson-Raybould, ministre de la Justice et procureure générale du Canada.
Des fonctionnaires des deux ministères ont assisté à la rencontre.
Environ 150 survivantes, membres des familles et proches des victimes provenant des collectivités autochtones de la province ont assisté à la rencontre de Saskatoon. Des aînés et des travailleurs en santé communautaire étaient aussi sur place afin de créer un milieu sain et propice aux discussions sur des questions difficiles.
Leadership et participation
On a demandé aux participants de dire qui, selon eux, devrait diriger l'enquête et qui devrait y participer. Selon les participants à la rencontre, la direction de l'enquête doit être assurée par :
- une femme autochtone dont l'œuvre est fortement ancrée dans la collectivité, la culture et le mouvement pour la justice pour les femmes et les filles autochtones assassinées et disparues;
- des commissaires qui font preuve de bonnes capacités d'écoute et de communication;
- des commissaires dotés d'un esprit critique;
- un commissaire de sexe masculin afin d'établir un équilibre;
- un commissaire de chaque province et territoire – le nombre 13 revêt une importance particulière dans la culture crie;
- un conseil consultatif des aînés qui participera à la sélection des commissaires.
Les participants ont aussi ciblé les groupes qui devraient avoir l'occasion de participer à l'enquête :
- les femmes, les hommes, les aînés et les jeunes;
- les leaders des collectivités et des organisations afin de fournir du soutien aux familles et aux survivantes.
Les participants ont insisté sur l'importance de faire participer les survivantes, les membres des familles et les proches de victimes. Pour ce faire, ils ont indiqué que l'enquête doit :
- éviter toute nouvelle victimisation des familles
- diversifier les méthodes de sensibilisation afin que les communications en ligne ne soient pas le premier point de contact avec les membres des collectivités. Une équipe préparatoire doit d'abord se rendre au sein des collectivités, leur expliquer le processus et les inviter à y prendre part;
- fournir du financement pour le soutien et la participation des familles et des survivantes;
- tenir des audiences plus près des collectivités d'origine;
- intégrer les lois et politiques autochtones;
- désigner un avocat ou un défenseur pour aider les familles à comprendre le processus judiciaire et autres processus;
- fournir du soutien aux familles malentendantes afin qu'elles puissent participer et communiquer pleinement;
- permettre aux participants de parler de façon anonyme par l'entremise d'un enregistreur afin qu'ils puissent partager leur histoire.
Priorités et questions clés
Les participants ont déterminé les questions auxquelles l'enquête doit répondre en vue de formuler des recommandations pour la prise de mesures concrètes. Parmi ces enjeux, mentionnons les suivants :
- les mesures de soutien pour les enfants abandonnés – les grands-parents ont besoin d'être appuyés pour prendre soin des enfants;
- les répercussions de la violence et des meurtres sur les enfants ne peuvent être sous-estimées. Certains ont recours aux dépendances ou au suicide ou deviennent victimes de violence à la suite du meurtre;
- les médias ne doivent pas verser dans le sensationnalisme, la stigmatisation et les stéréotypes en ce qui a trait aux victimes puisque les familles et les enfants peuvent subir un nouveau traumatisme en raison des portraits insensibles ou racistes dépeints par les médias;
- le système judiciaire doit être examiné et la question du racisme doit être traitée – des corps de police indépendants devraient se pencher sur ces dossiers;
- les déficits présents dans les secteurs de l'éducation, la santé et l'économie ainsi que le rapport entre ces déficits et la vulnérabilité des membres des collectivités autochtones;
- les règles d'enquête doivent être révisées;
- des améliorations doivent être apportées à la communication liée aux enquêtes en cours entre les corps policiers et les familles – les familles veulent comprendre pourquoi les affaires stagnent et savoir si elles ont été classées comme des « affaires non résolues »;
- le recrutement et la formation des policiers – les recrues doivent être évaluées en fonction de leurs connaissances et de leur compréhension de la culture autochtone. Il est préférable d'envoyer des agents qui ont une bonne connaissance des Autochtones au sein des collectivités plutôt que des novices;
- la reconnaissance des traités anciens, fondés sur le droit international, et la relation entre le manque de reconnaissance et la violence à l'égard des collectivités autochtones.
Soutien et pratiques culturelles
Les participants ont souligné la nécessité d'inclure des pratiques et des cérémonies traditionnelles au processus d'enquête. Ce dernier doit aussi comprendre des processus de guérison afin de reconnaître le traumatisme subi par les personnes touchées et de le surmonter.
Parmi les recommandations sur la façon d'inclure les pratiques et les cérémonies culturelles, notons :
- à Saskatoon, l'enquête doit débuter par une cérémonie du calumet et se terminer avec une danse en rond et un moment de silence. Les pratiques culturelles appropriées doivent être respectées dans chaque territoire;
- chaque matin doit débuter par un cercle de tambours et un chant;
- il ne s'agit pas uniquement des pratiques culturelles, mais également de l'intégration des lois, de la mentalité et des politiques autochtones.
Autres commentaires
Les participants ont été invités à fournir leurs commentaires et leurs opinions sur la définition des paramètres de l'enquête et à discuter de questions autres que celles énumérées dans le guide de discussion. Notamment :
- l'enquête doit être effectuée à l'échelle nationale;
- un conseil consultatif des aînés doit orienter l'enquête et demeurer en place au terme de l'enquête;
- des services de soutien en santé mentale doivent être offerts aux familles – il s'agit d'un besoin à long terme;
- l'enquête doit apporter des résultats et des changements concrets à tous les échelons de la société;
- les enfants doivent être sensibilisés à la sécurité et la prévention;
- l'enquête doit faire face aux divers degrés de traumatisme, violence latérale et pauvreté qui touchent les collectivités;
- les questions liées à la protection de l'enfance doivent être traitées. Lorsqu'une mère est assassinée, les services d'aide sociale à l'enfance ne devraient pas prendre les enfants en charge, mais plutôt faire en sorte qu'ils demeurent dans leur famille. Dans le cas contraire, les familles perdent non seulement une personne qui leur était chère, mais également les enfants;
- des efforts de collaboration doivent être entrepris entre les organisations et les différents échelons de la société, et ce, jusque dans les collectivités;
- quelqu'un doit représenter les intérêts des familles, les orienter dans les systèmes judiciaire et policier et les familiariser avec le langage des personnes plus scolarisées;
- l'enquête devra rouvrir les dossiers des affaires non résolues et les examiner afin de déterminer si elles ont fait l'objet d'une diligence raisonnable lors de l'enquête initiale.