Treizième rencontre sur la définition des paramètres de l’enquête : 7 et 8 février 2016, Winnipeg, Manitoba
Dans le cadre de l'enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, le gouvernement du Canada a tenu sa treizième rencontre à Winnipeg, au Manitoba, les 7 et 8 février 2016. Des familles et des proches de femmes et de filles autochtones disparues et assassinées ainsi que des survivantes et des représentants ayant apporté leur soutien aux familles ont participé à cette rencontre préalable à l'enquête. Leur expérience, leurs opinions et leurs contributions serviront à définir les paramètres de l'enquête.
Vous trouverez ci-dessous un résumé de la rencontre. Ce résumé ne consiste pas en un compte rendu complet des discussions. Il met plutôt en relief les principaux thèmes qui sont ressortis de cette rencontre de mobilisation. Vous pouvez également consulter le guide de discussion ayant servi à orienter la rencontre.
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Aperçu
La séance de mobilisation a duré deux jours. La première journée était une journée de préparation. Les aînés sont arrivés le 7 février et ont préparé la salle, notamment en vue de la tenue d'une séance d'inscription et d'orientation où les familles, les proches et les survivantes pouvaient faire part de l'histoire de leur famille et de leurs récits personnels concernant la violence dont ils ont été victimes. Les effets considérables de la violence et des mauvais traitements ainsi que le cheminement des familles et des survivantes vers la guérison ont fait partie des sujets abordés.
Lors de la deuxième journée, les participants ont été invités à se prononcer sur la définition des paramètres de l'enquête. Ils ont fait part de leurs commentaires au sein d'un cercle de discussion pendant la première partie de la journée, puis ont été séparés en petits groupes pendant la deuxième partie. La journée a commencé et s'est terminée par des rituels traditionnels, dont un cercle de tambours, des prières et des chants. Les participants ont rendu hommage aux femmes et aux filles qui ont été assassinées et qui sont toujours portées disparues.
La ministre des Affaires autochtones et du Nord a écouté les besoins et l'expérience des familles et des proches des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées, des survivantes et d'autres participants. Ceux-ci ont fait part de leur opinion sur la définition des paramètres de l'enquête afin de répondre à leurs besoins et leur expérience.
Les personnes qui assistaient à la rencontre de Winnipeg ont souligné l'importance de s'assurer qu'une approche axée sur les familles et les survivantes oriente l'enquête, notamment en tenant compte de leurs besoins en matière de sécurité et de guérison avant, pendant et après le processus d'enquête. La discussion était axée sur l'expérience des participants concernant plusieurs établissements et sur leur désir de voir l'enquête apporter des améliorations dans les secteurs visés.
Les participants
Plus de 180 membres des familles, proches des victimes, personnes ayant survécu à la violence et représentants qui apportent leur soutien aux familles ont assisté à la rencontre au Manitoba. Les participants provenaient de plusieurs collectivités autochtones, principalement de la province du Manitoba, mais également de l'Ontario, de la Saskatchewan et de la Colombie-Britannique.
Soulignons également la présence de :
- l'honorable Carolyn Bennett, ministre des Affaires autochtones et du Nord
- l'honorable MaryAnn Mihychuk, ministre de l'Emploi, du Développement de la main-d'œuvre et du Travail
De plus, des responsables des ministères des Affaires autochtones et du Nord et de la Condition féminine ont assisté à la rencontre tout au long de la journée. Des travailleurs de soutien en santé (notamment des aînés autochtones) de Santé Canada étaient sur place afin d'assurer le bien-être des participants. Ils étaient également disponibles toute la nuit afin d'offrir un soutien culturel et affectif additionnel.
Leadership et participation
On a demandé aux participants de dire qui, selon eux, devrait diriger l'enquête et qui devrait y participer. Selon les participants à la rencontre, la direction de l'enquête doit être assurée par :
- un équilibre entre des commissaires représentants les femmes, les hommes et les personnes bispirituelles;
- des commissaires qui ont de l'expérience en matière de soutien aux familles, avec lesquelles ils ont eu un contact direct;
- des commissaires possédant une formation juridique;
- des aînés.
Certains participants ont également suggéré la mise en place d'un conseil consultatif composé de membres des familles, représentant chaque province et territoire, afin d'orienter et d'appuyer l'enquête de façon à mettre l'accent sur les besoins des familles tout au long du processus.
D'autres participants ont souligné l'importance de s'assurer que les commissaires ont accès à du soutien en raison de la nature délicate de leur travail.
Les participants ont aussi ciblé les groupes qui devraient avoir l'occasion de participer à l'enquête :
- les membres des familles et les proches;
- les personnes qui ont survécu à la violence, y compris les victimes de violence sexuelle et familiale et les personnes ayant été exploitées à des fins de commerce sexuel;
- les jeunes, notamment les jeunes à risques et qui ont perdu un membre de leur famille;
- les organismes communautaires;
- les aînés et les grands-parents;
- les guérisseurs, conseillers et gardiens de la foi traditionnelle;
- les chefs et les conseils;
Priorités et questions clés
Les participants ont déterminé un vaste éventail de questions auxquelles l'enquête doit répondre. Ces enjeux comprennent notamment :
- les causes de la violence, y compris les répercussions intergénérationnelles des pensionnats indiens sur les relations familiales et communautaires;
- les écarts socioéconomiques, y compris la pauvreté, le manque d'accès à l'éducation et l'itinérance;
- les effets de la violence, notamment sur la santé mentale et les dépendances;
- le racisme systémique, la discrimination et la dévalorisation des femmes;
- le traitement différent des Autochtones et des non- Autochtones;
- l'exploitation sexuelle, la traite de personnes et la prostitution;
- les façons d'appuyer les personnes bispirituelles et transgenres qui ont survécu à la violence;
- les raisons pour lesquelles les femmes et les filles autochtones quittent les réserves et ce dont elles ont besoin lorsqu'elles déménagent dans des centres urbains;
- les pratiques policières, notamment quand et comment les cas de disparition sont pris en charge, les protocoles de communication, l'exhaustivité des enquêtes, les mesures de suivi (y compris lorsque des restes humains sont découverts);
- les mécanismes de reddition de comptes de la police et de surveillance;
- la criminalisation des femmes autochtones et le taux élevé de femmes et de filles autochtones emprisonnées;
- le type et la sévérité des peines imposées aux auteurs d'actes de violence à l'égard des femmes et des filles autochtones;
- la réticence à partager l'information dans certaines collectivités par crainte de représailles;
- les services de logement, notamment les personnes qui peuvent avoir accès aux services de logement pour femmes;
- le lien entre la protection de l'enfance (services d'aide à l'enfance et aux familles) et les filles autochtones exposées à la violence;
- la manière d'offrir du soutien aux enfants abandonnés;
- les façons de favoriser la guérison afin que les familles soient en mesure de collaborer avec les corps policiers et les services d'aide à l'enfance et aux familles;
- les façons concrètes d'appuyer les familles de personnes disparues, notamment en préparant des rapports de personnes disparues et en organisant des recherches;
- les façons de favoriser la guérison des familles et des collectivités, aussi bien lorsqu'elles se trouvent en situation de crise que lorsqu'elles requièrent un suivi à long terme;
- les façons de sensibiliser les jeunes au sujet des relations saines en vue de prévenir la violence;
- le rôle des médias dans la propagation des stéréotypes;
- les façons de sensibiliser les Canadiens en vue de mettre fin aux stéréotypes et à la discrimination.
Les participants ont indiqué que des changements doivent être apportés dans plusieurs secteurs et que l'enquête devrait donner lieu à des recommandations visant à informer :
- les divers ordres de gouvernement;
- les agents d'application de la loi et du système de justice;
- les collectivités;
- les compétences parentales au sein des familles;
- l'ensemble des citoyens canadiens.
Les participants ont précisé l'importance de prendre des mesures pour répondre aux questions en vue de formuler des recommandations concrètes pour la mise en place de mesures et d'améliorations. Selon eux, les recommandations devraient :
- adopter une approche proactive plutôt que réactive face aux questions en vue de prévenir la violence;
- établir des échéances claires pour la prise de mesures;
- faire l'objet d'un suivi régulier afin d'évaluer les progrès.
Soutien et pratiques culturelles
Les participants ont souligné la nécessité d'honorer et de respecter les pratiques, les protocoles et les cérémonies traditionnels lors du processus d'enquête.
Ils ont expliqué que les familles doivent être soutenues tout au long du processus et qu'il sera essentiel d'inclure :
- des commissaires et du personnel auxquels les familles font confiance;
- les aînés;
- les jeunes;
- les guérisseurs.
Les participants ont insisté sur l'importance d'adopter une approche axée sur les familles dans le cadre de l'enquête. Selon eux, les mesures suivantes devraient être prises dans le cadre de l'enquête afin d'appuyer les familles :
- se rendre dans les collectivités rurales éloignées du Nord afin de rencontrer les familles qui n'ont pas souvent l'occasion de prendre la parole;
- tenir compte des besoins pratiques des familles, y compris apporter du soutien pour le transport, la nourriture et la garde des enfants pendant les rencontres;
- garantir la confidentialité;
- assurer la sécurité des familles, certaines craignant d'être victimes de représailles si elles racontent leur histoire;
- s'efforcer de prévenir un nouveau traumatisme lorsque les membres des familles font part de leur histoire;
- offrir différentes méthodes pour faire une présentation (par exemple, enregistrements vidéo, lettres ou petites rencontres privées)
Autres commentaires
Les participants ont également discuté de diverses questions qui pourraient orienter l'enquête et déterminer les mesures à prendre pendant l'enquête afin de combattre et de prévenir la violence contre les femmes et les filles autochtones. Il faudra notamment :
- s'appuyer sur les recommandations et les rapports existants – en d'autres termes, ne pas attendre la fin de l'enquête pour prendre les mesures nécessaires;
- mieux faire connaître l'histoire des personnes bispirituelles et transgenres disparues et assassinées;
- obtenir les commentaires et l'opinion des personnes qui ont été victimes de violence et de mauvais traitements;
- étudier la façon dont certaines causes fondamentales de la violence à l'égard des femmes et des filles autochtones touchent également les hommes autochtones, y compris les effets à long terme du colonialisme et des pensionnats indiens;
- comprendre les différences entre les diverses expériences vécues par les femmes autochtones et en tenir compte (par exemple, à l'intérieur et à l'extérieur des réserves, dans le Nord et le Sud);
- étudier des moyens de mobiliser le système d'éducation afin de garantir la participation des jeunes au processus et à la formulation de recommandations;
- garantir que les familles ont accès à un endroit sécuritaire où elles peuvent obtenir du soutien de la part des aînés et se rassembler;
- réfléchir à des façons symboliques de favoriser la guérison au sein des relations (par exemple, par l'entremise d'une journée nationale, de la présentation d'excuses ou d'un monument commémoratif);
- trouver des façons d'intégrer l'art et la culture dans le processus de guérison.